18 PIECES CARACTERISTIQUES

Francis BAUDEVIN

ZIGZAGWEB

Cette exposition de Francis Baudevin présente une suite nouvelle de dix-huit sérigraphies dont quinze sont des variations sur des tableaux présents dans son œuvre, les trois autres étant peut-être des tableaux à venir. Cette étude se caractérise par une contrainte chromatique qu’il s’est donnée : le noir, le blanc du papier et l’orange-fluo, l’attrait pour cette dernière couleur lui ayant été inspiré par Sœur Corita Kent (1918-1986), géniale pop-sérigraphe américaine.

Pour rappeler brièvement la recherche de Baudevin, disons simplement qu’il conjugue trois passions: le graphisme, la musique et l’art abstrait. C’est dès 1987, s’appropriant la composition de différents emballages qu’il met au point un travail rendant caduque la distinction courante entre abstraction et figuration. Ce travail se caractérise par sa rigueur conceptuelle et une précision sans égal dans la restitution des teintes et des formes géométriques qu’il traduit sur la toile. Grâce à cela, ses tableaux sont complètement identifiables  malgré la variété de leurs compositions. Ajoutant à ce système un goût certain pour la référence, il constitue petit à petit un véritable répertoire de l’art abstrait comme autant d’hommages à ses peintres de prédilection.

Il s’intéresse également à revisiter ses propres tableaux, tels qu’ils apparaissent reproduits dans les catalogues d’exposition, relevant tantôt une différence de format tantôt une nuance de couleur. Et il y a quelques années, il élargit son champ d’investigation en réinterprétant ses propres compositions jouant de toutes sortes d’aspects formels. Par cette étape, il affranchit ses tableaux de leur origine première : le marché de l’emballage. Depuis peu, il s’intéresse à introduire dans sa réflexion les teintes fluorescentes. Mentionnons en particulier cette exposition collective encore visible jusqu’au 17 juin : Color Block à la galerie parisienne Triple V.

Par ailleurs, Francis Baudevin pense autant des yeux que des oreilles. La musique est si présente dans son œuvre, qu’elle fait parfois vibrer l’image et lorsqu’il utilise la photographie, c’est pour fixer la composition d’une pochette de disque tirée de son impressionnante collection. Les déplacements du son vers l’image sont troublants. L’artiste nous refait, à cet endroit, le coup du « lapin-canard »,  non plus entre figuration et abstraction, mais entre l’aspect visuel et sonore d’un objet. Vous ne serez pas étonné, regardant l’une ou l’autre de ses photographies, d’entendre le souvenir d’une mélodie. La mémoire est ainsi faite : qui découvre l’objet pour lapremière fois le croit vide, mais qui le reconnait tout ou partie, ravive le récit qu’il contient.

Ici cependant, dans les vitrines de cette exposition, ce sont quelques pochettes choisies que l’artiste nous montre de façon à donner à l’ensemble une cohérence de tonalité (et nous montrer par là-même son nuancier très personnel que constitue également sa collection de disques). On reconnaitra en particulier trois différentes éditions de trois pièces du compositeur Frederic Rzewski (Les moutons de panurge, Attica et Coming Together). Ces images silencieuses vibrent néanmoins d’une répétition « augmentée » entre les pochettes et la musique répétitive dont elles gardent une forme d’empreinte à l’instar du disque vinyle qu’elles protègent.

Enfin bien sûr, sur cette ligne entre écoute et regard, il y a les mots et les noms propres, dont Francis Baudevin aime jouer. Ainsi, 18 pièces caractéristiques est un titre se référant aux suites pour piano de Robert Schumann, les Davidsbündlertänzem découvertes à travers le court métrage de Georges Perec : Les lieux d’une fugue. Et vous n’aurez pas tort de partir en quête de nouvelles associations d’idées visuelles, verbales et sonores que l’artiste glisse toujours malicieusement dans ses arrangements.

 

 

Date

Du 10/05/17 au 29/06/17

Vernissage

le mercredi 10 mai 2017 à 18h