PICTURES OF HER

Aimée HOVING

Depuis aussi longtemps qu’elle tient une caméra entre ses mains, Aimée Hoving photographie des femmes. Toujours dans un environnement familier si possible: famille, amies, amies d’amies. Rester dans un cadre privé, cela l’aide à mieux « décadrer » ses personnages, les faire sortir du cadre justement. Sans doute parce qu’on ne peut pas prendre tous les risques en même temps.

Utiliser son propre réseau amical et familial, c’est une manière de révéler l’éducation qu’elle a reçue de ses parents, et qu’elle interroge justement dans son travail. Tout est matière à réflexion, à révélation plutôt.

Après avoir été diplômée de l’ECAL, Aimée Hoving a tenté d’aborder l’univers de l’homme: avocats du barreau, hommes d’affaires, tous sont passés derrière son objectif. Mais son objectif était autre, et l’univers féminin l’a rappelée à son bon souvenir. « C’est plus facile. Je ne sais pas pourquoi. Elles me comprennent. Je les comprends », dit-elle.

Ses photographies sont le résultat d’une observation du réel qu’elle va détourner au gré de son imaginaire, mais juste un peu, pas trop. A peine un décalage qui donne ce ton particulier à ses images. Une unicité. Sa signature.

Le titre de la série « Pictures of Her » est déroutant: qui est « Elle »?  En regardant les images, on devine que c’est une enfant, toujours la même, dans des postures qui pourraient être un jeu, ou pas: est-ce que l’enfant joue à cache-cache ou essaye de s’échapper en sautant par la fenêtre, en se fondant dans le décor au point de devenir un rideau, une lampe, un meuble, que l’on pose là ?  Aucun prénom, rien ne permet de deviner qu’il s’agit de la fille de la photographe et que ce duo, elles le dansent ensemble. La mère propose, la fille dispose, et vice et versa. Un travail en commun. Une performance.

On ne peut pas parler de jeu de rôle car l’intention n’y est pas. Il y a quelque chose de l’ordre du jeu, certes, surtout pour la petite fille, mais un jeu sérieux. Pour la mère en revanche, il y a urgence de saisir un instant où sa fille devient un être hybride entre l’humain et l’objet animé, comme dans un dessin animé.

Le travail d’Aimée Hoving avec sa fille relève à la fois d’une réflexion sur son rôle de mère: jusqu’où peut-on montrer son enfant à l’heure d’Instagram et des vies dévoilées? C’est aussi une manière de réfléchir à son propre rôle de fille: elle photographie son enfant dans les lieux de son enfance. Pour mieux la revisiter? La conjurer? La transformer?

Cette série a commencé par des photos d’enfant, comme font tous les parents, afin de garder une trace d’un temps vite révolu. De ce geste anodin, non conscient, est née une démarche artistique où les deux protagonistes tiennent un rôle.

On sent que quelque chose s’est passé avant la photo, ou va se passer après le déclic, et qu’Aimée Hoving a justement choisi de saisir ce moment de bascule. Celui où tout est encore possible avant l’inéluctable. Est-ce que la situation est grave, ou tout va finir dans un éclat de rire? Ces images nous obligent à nous interroger sur notre propre perception de l’enfance. Et du rôle de l’enfant dans notre vie. Même si les situations ont quelque chose d’irréel, on n’est pas dans l’un de ces contes pour enfants qui se termine forcément bien par une phrase sibylline.

On est dans un univers où onirisme et étrangeté se tiennent par la main, même si Aimée Hoving travaille en lumière naturelle.

Et si c’était un rêve?

Isabelle Cerboneschi, avril 2018

liens presse:

http://phototheoria.ch/f/PhotoTheoria30_201805.pdf

https://all-i-c.com/aimee-hoving/

http://www.bilan.ch/etienne-dumont/courants-dart/geneveembouteillage-nuit-bains-etait-celle-meg-mah

http://delarthelvetiquecontemporain.blog.24heures.ch/apps/m/archive/2018/05/06/aimee-hoving-maisons-de-l-etre-865625.html

Questions/réponses avec la photographe Aimée Hoving

 

Date

Du 18/05/18 au 30/06/18

Vernissage

le jeudi 17 mai 2018 dès 18h